A la fin du XIII° siècle, alors que le château venait d’être reconstruit, Autichamp comptait trois édifices religieux : une chapelle castrale, l'ancienne église et le prieuré Saint Jean. L'église en trop mauvaise état sera détruite au XVIII° et remplacée par l'église dédiée à St Jean Baptiste.
Située à l’emplacement de la ferme Gasquet devenue ferme Rosier
Il n’en subsiste aujourd’hui que le nom du lieu dit « la chapelle » et peut être une voute sur laquelle est bâtie une partie de la ferme mais cela reste à vérifier. Celle ci était réservée au seigneur. Louise Olympe de Beaumont décèdera en son château en 1665 et sera d’ailleurs « ensevelie dans les tombes des seigneurs du lieu ». Sans nul doute dans cette chapelle.
La croix actuelle située à l’angle du jardin de la ferme fut mise en place à l’occasion de la mission du jubilé de 1875. Elle n’a qu’une relation symbolique avec cet édifice.
Image des pensées religieuses et chevaleresques du seigneur du lieu, l’église fut bâtie au XIII° siècle. Elle dépendait, selon toute vraisemblance, de l’église St Pierre de Chabrillan.
Il faut avoir à l’esprit que la foi des habitants, faite de craintes, était primitive. L’église encadrait et rythmait la vie des fidèles. La journée était ponctuée du son de la cloche. L’année s’écoulait de fêtes religieuses en fêtes religieuses et la vie était marquée par les sacrements (baptêmes, mariage …).
Concernant le nom de cette église un doute subsiste. En 1516 (d'aprés l'archiviste départemental J de Font-Réaulx) est cité "Sancti Sébastiani" et dans plusieurs actes paroissiaux (1667-1671-1673) l'église apparait clairement sous le nom de St Sébastien. Par contre, en 1743, le nouveau cimetière est béni en remplacement de celui situé dans l'église Sainte Anne (état civil).Il n'y avait pas d'autre église à Autichamp.
La nef, relativement vaste, était, en toute vraisemblance, bâtie à l’emplacement de la placette actuelle où se trouvent la table d'orientation et le banc. Les défunts étaient enterrés au sein même de l’église, ce qui posait de sérieux problèmes les jours d’enterrement. De nombreux ossements ont été retrouvés à cet endroit.
Le toit reposait sur une charpente en bois. Sur le clocher, il reste encore une console au sud et l’emplacement pour une autre. Les murs n'étaient pas prévus pour supporter des voutes. La pierre de l’autel était à l’est (elle a été recyclée, il y a une quinzaine d’années à l’entrée d’une maison). En 1665, les consuls réclamaient à l’évèque une voûte de chœur. Le bâtiment en était aussi dépourvu. Les châssis n’étaient recouverts que de papier translucide ou de toile.Les édifices de cette époque étaient simples et dépourvus d’ornementation
Le clocher possédait, dans un tout premier temps, comme l’église de Chabrillan, un toit en bois. Le cône, bâti en pierre à 8 pans très atténués, fut construit par la suite. Les planchers intérieurs intermédiaires ont aujourd’hui disparu. Le clocher est percé sur chaque face d’une baie de style roman sauf au nord où il y en a deux. Plus qu’un choix esthétique, sans doute, s’agit-il là d’un choix acoustique.
Fidèles à la foi de leurs pères, les habitants d’Autichamp, ont probablement repoussé avec mépris les doctrines de Calvin. L’église fut épargnée lors des guerres de religions.
Toutefois en 1662, un constat décrit son état déplorable mais aucune réparation ne sera entreprise. En 1718, une forte grêle endommage l’ensemble du village et ne fait qu’aggraver les choses. Une quinzaine d’année plus tard, la population tente d’attirer l’attention de l’intendant du Dauphin, le toit et les murs menaçant de s’effondrer.
En 1735, grâce à la générosité des habitants, dans l’urgence, quelques travaux sont entrepris mais devant l’ampleur du travail et compte tenu de l’état de l’infrastructure, des dimensions qui ne correspondent plus à l’usage, son abandon et sa destruction sont décidés. Une nouvelle église sera construite mais, par attachement et aussi parce qu’il est visible de loin, le clocher est conservé. En attendant les messes seront dites dans la chapelle du château.
En 1662 le curé d’Autichamp se plaint de sa cloche cassée qu’il ne peut presque plus sonner. Il demande humblement aux consuls de la municipalité qu'elle soit refondue. Il lui faudra attendre. La nouvelle cloche fut baptisée en 1744.
Fut-elle refondue ? Peut ètre car le 28 novembre 1779 sera baptisée la cloche que nous entendons encore sonner tous les jours. Le parrain Noble Louis Thérèse de Beaumont, marquis d’Autichamp, haut gradé de l’armée royale, étant absent, c’est son maitre d’affaires Messire Masson Le Jeune de Carpentras qui le représentera ce jour là.
Sans nul doute, les autichampois et le marquis tenaient-ils particulièrement au vieux clocher (tout comme nous d’ailleurs). La superbe cloche flambant neuve fut non pas mise en place dans la nouvelle église mais bien au sommet du vieil édifice.
Nous n'avons pas de traces de la petite cloche de l'église St Jean Baptiste. "Je m'appelle Henriette Jeanne" est inscrit sur son pourtour.
Inquiétantes et menaçantes, à l’époque où les gens ne savaient pas lire, elles trainaient derrière elles fantasmes et légendes. Le mal étant le pire ennemi de l’église, il fallait un moyen pour l’éloigner. Les gargouilles étaient les gardiennes du lieu. Passer sous l’eau divine qu’elles crachaient était bénéfique.
Celles du clocher d’Autichamp sont parmi les plus anciennes de la région. Peu d’édifice les ont conservées. Il y en avait au quatre angles (La quatrième est en réemploi sur une façade au dessus de la petite fontaine face à la mairie) et une cinquième, à mi hauteur à l’angle nord- ouest. Cette dernière est relativement sophistiquée. L’eau est captée par un caniveau à mi hauteur au sud, ensuite, elle parcourt l’intérieur du mur ouest dans un canal pour ressortir à l’angle vers le nord.
En 1037, le comte Adhémar cédait à Odilon de Mercoeur, abbé de Cluny, l’église de St Marcel les Sauzet. Dès lors, celle-ci étendra son influence sur toute la région en installant plusieurs prieurés. Le prieuré St Jean (Prioratus de Alticampo - Pouillé de Valence) apparaît dans les textes du XIV° siècle (prioratus de Autichant Valentinensis dioecesis - Pouillé général du XVI°)
Les quelques moines (aux environs de cinq) sous l’autorité de l’Abbé, observaient la règle de St Benoît. Leur vie était donc organisée au travers de trois activités principales : la prière, la lecture des écritures et le travail manuel. Ils vivaient des fruits de ce dernier mais disposaient aussi de droits et prélevaient la dime. En revanche, ils étaient tenus de desservir la paroisse. Ils pouvaient recevoir une église en donation. A Autichamp en 1541, le prieur Jacques Faure, fut curé de Rochebaudin et de Jonchères.
La concurrence semblait parfois exister entre les représentants du clergé régulier (qui suit une règle) et le clergé séculier (celui du siècle qui vit au milieu de la population). En 1448 une sentence d’officialité (décision de justice) de l’évêque de Valence, est prononcée entre Pierre Samuelli, curé de la paroisse et Pierre Roche, prieur, au sujet de la dime.
Dans des écrits récents il est souvent mentionné que le prieuré St Jean fut détruit lors des guerres de religions (1540-1550). Nous n’avons rien trouvé en ce sens, bien au contraire. Cependant, il n’est plus visité par le représentant de l’Abbaye de Cluny, elle-même en plein déclin. Il est peu rentable et ne semble plus digne d’intérêts. Il paraît peu entretenu mais reste occupé.
Au début du XVII° siècle la paroisse semble attribuée à la communauté. Le premier curé qui apparait est Claude Florent en 1615.
En 1665, les consuls (en quelque sorte les conseillers municipaux) déposent une requête auprès de l’évêque afin d’obtenir du prieur un calice en argent, un ciboire, un missel et une voûte de choeur pour l’église. La demande sera suivie d’une ordonnance conforme. Le.dialogue semble plus difficile.qu'auparavant.
En novembre 1696, au cours d’une assemblée générale avec le châtelain, la vente du cimetière des religionnaires, devenu inutile, est à l’ordre du jour. Il est déclaré que le fond ne produit plus rien à la communauté. Pour le prix de cette vente il est demandé au seigneur que soit attribué une maison curiale à M le Curé (ceci afin d’éviter un procès de la part de ce dernier). Ce qui sera fait, la maison Lanthelme sera acquise et servira de presbytère.
Comme tous les biens ecclésiastiques, le prieuré sera saisi après la révolution, lors de l’inventaire du 30 novembre 1790 (voir le paragraphe concernant le curé Charbonnel dans la partie « histoire » du site) et sera vendu aux enchères à un certain M Rey.
En 1860 les statistiques de la préfecture de la Drôme mentionnent : « A un kilomètre du village au domaine habité aujourd’hui par la famille Loire, on trouve une chapelle assez bien conservée de forme antique dédiée à St Jean Baptiste…. ».Cette dernière sert d'écurie.
Le bâtiment est toujours la résidence d’un particulier. La voûte de chœur, à l’assemblage très particulier fait de moellons de molasse taillés en pointes (comme autant de clés en pyramides tronquées) disposés en diagonale, est toujours visible et a été particulièrement bien mise en valeur.
Le 18 décembre 1763, un consul propose que soit reconstruite une nouvelle église plutôt que de réparer l’ancien édifice. L’assemblée adopte à l’unanimité cette proposition. Des devis ont été établis mais la communauté ne peut assumer une telle dépense. Deux ans plus tard, les consuls supplient le marquis de leur accorder, au nom des habitants, un emplacement et quelques « secours » pour « pourvoir survenir à leur objet ».
La construction est décidée en 1768 à la condition que le châtelain confirme la donation du terrain. L’église sera baptisée sous le vocable de Saint Jean-Baptiste, le 28 octobre 1771.
Par soucis d’économie de nombreux matériaux provenant de l’ancien édifice ont été réemployés. Aujourd'hui les murs ayant été décrépis, des pierres de taille sont notamment visibles, à l’extérieur, au niveau de l’abside et quelques unes ont été utilisées pour les chaînages d’angle. Au niveau du clocheton, deux colonnettes surmontées d’un chapiteau décoré de fleurs d’eau avaient été signalées par Paul Valette dans son pré-inventaire de 1976. Elles semblent avoir disparues. Apparemment de style mérovingien, elles auraient pu permettre une datation plus juste de l’ancienne église.
La sacristie n’est pas d’origine. Elle fut construite vraisemblablement après la révolution, le curé ayant été expulsé de la cure. L’église n’avait plus de locaux.
Le bâtiment a subi une rénovation complète au début du XX° siècle. Le décor bleu et blanc date de cette période ainsi que les autels en plaques de marbre blanc, les carreaux ciment du chœur, les statues que l’on retrouve dans d’autres églises de la région.
Avant la restauration, les chutes d’enduit et les sondages révèlaient clairement le décor d’origine. Les voûtes et les baies étaient surlignées par des filets et des bandeaux d’ocres
jaunes et rouges. Un décor de faux marbre rouge et gris bleuté, valorisait la voûte du chœur, les pilastres et le vieil autel. Celui-ci, en pierre, magnifiquement sculpté, est conservé dans la
chapelle St Joseph, à droite du chœur. Une partie de ces décors sont aujourd'hui restitués. Des sondages auront lieu prochainement sur le vieil autel en vue d'une possible
restauration.
Plusieurs vitraux en bon état, datant de la fin du XIX° siècle, apportent la clarté nécessaire. L’un à l’ouest représente Saint Rémi, l’autre à l’est représente Saint-Louis. Le vitrail au
dessus de la porte d’entrée est seulement décoratif.
L’ensemble défensif, composé de la tour de la mairie et de l’ancienne porte sud sont les témoins les plus visibles des fortifications reconstruites au Moyen-Age. La première (qui est pleine) surplombait le chemin arrivant du sud. Au début du XX° siècle celui-ci existait encore. Plus haut sur l’ancienne porte, les corbeaux de la bretèche (vraisemblablement en bois) sont relativement bien conservés. De chaque côté de l’entrée les trous de coulissement de la poutre de fermeture sont encore visibles.
A l’est et à l’ouest du village, l’épaisseur et l’alignement des murs témoignent de l’existence des remparts. Quant au château lui même, il fut tant remanié qu’il est difficile d’identifier l’édifice d’origine.
Un mur très ancien subsiste à l’intérieur de la tour. Il semblerait qu’il y ait même un puits (ou une citerne)comblé à cet endroit. Ce mur daterait-il de la toute première enceinte ? Paul Valette, quant à lui, notait un arrachement au niveau de la terrasse voisine de l’église. Il émettait l’hypothèse d’une seconde tour et donc d’un château en quadrilatère avec une tour à chaque angle. La première supposition semble plausible :l’aile nord du château renaissance comportait des sous-sols. Ceux-ci sont encore accessibles par un souterrain mais ils ont été comblés par les gravats. Leur existence peut prouver la présence d’un ancien fossé qui coïnciderait parfaitement avec la tour de M. Valette.
Nous pouvons, également, nous permettre d’émettre une autre hypothèse qui serait celle d’un donjon servant de refuge ultime accolé, à l’est, à une habitation rectangulaire. Ce qui serait possible si nous nous basons sur l’épaisseur plus importante des murs de cette partie de l'édifice et sur le type d’ouverture encore visibles sur les photographies du début du siècle dernier.
A la fin du XVII° siècle, Gaspard de Beaumont, nouvel héritier du fief d’Autichamp, se devait d’affirmer son rang. Il semblerait qu’il n’ait pas touché à l’habitation seigneuriale par contre il fit table rase des remparts. S’appuyant sans doute sur les fondations de ces derniers, il fit construire une extension à l’est et deux ailes au nord. Plus haute que l’ancien château la nouvelle demeure avait un caractère résidentiel et non plus défensif. L’architecture était de style Renaissance. Les façades enduites étaient percées de fenêtres à croisée. Les linteaux des portes étaient ornés d’accolades. Le château comportait une cour intérieure donnant directement dans les appartements du seigneur. Le château de l’Arthaudière en Isère est du même style, il lui est tout à fait comparable.
La construction du château, des jardins et du pont (nous allons le voir ci-dessous), nécessita forcément une main d’œuvre importante et la présence de cadres pour diriger ces chantiers qui se déroulèrent tous sur une très courte période. Etait-ce pour loger ces derniers ou était-ce grâce à cette prospérité locale, toujours est-il que plusieurs maison furent construites à cette époque dans le village. La plus remarquable est sans doute celle accolée à la porte sud. Deux fenêtres à demie croisée finement sculptées ornent la façade. Certaines pierres sont récentes mais elles sont la copie d’éléments existants. Une autre fenêtre à demie croisée est également visible au dessus d’un passage vouté plus haut à l’ouest. Ce passage servait à relier les deux maisons d’un même propriétaire. On distingue les deux corbeaux d’une imposante cheminée sur la façade voisine. Sur d’anciennes photographies, une autre ouverture identique est décelable sur une bâtisse, aujourd’hui disparue, face à l’actuelle menuiserie.
Pour en revenir au château, après la Révolution, il fut partagé en plusieurs lots et vendu aux enchères. Au cours du XX° siècle une partie fut conservée en tant qu’habitation, une autre servit de hangar agricole, une autre était en ruine. La salle en contrebas servit temporairement d’atelier de menuiserie.
Mlle Martin, une jeune passionnée de belles pierres s’évertua à rassembler quelques parcelles et commença à restaurer une partie du château. Elle fut ensuite aidée par son mari, M. Sadok, qui compléta cette acquisition. Tout deux réalisèrent les transformations qui aboutirent à cet ensemble superbe que nous connaissons aujourd’hui.
L’édifice, en fort mauvais état, ne put être reconstruit à l’identique. La partie la plus au nord fut démolie. Les caves furent comblées. Avec beaucoup de goût, le mur donnant sur la cour intérieure fut conservé ainsi que la porte monumentale. Afin d’être mieux adapté au niveau des planchers mais aussi pour équilibrer les volumes, la toiture côté est fut rabaissée (les fenêtres à croisée murées sont encore visibles en façade) et au sud, la tour et la partie adjacente furent surélevées.
Cette magnifique demeure appartient aujourd’hui à M. et Mme Van Fenema, cette dernière étant la co-présidente de notre association.
Les jardins d’Autichamp de par leur typologie sont tout à fait uniques. En France, ils sont les seuls séparés de leur château par le village. Ce dernier est d’ailleurs complètement pris en compte dans cette conception paysagère. Les terrasses ont sensiblement la même longueur que l’agglomération et le château couronne le tout. Pour l'instant, une certaine maîtrise de l'urbanisme a permis de conserver cette physionomie qui nous tient tant à coeur.
Ils forment un ensemble du XVI° siècle exceptionnel, pratiquement conservé en l’état. Seuls ceux du Château de l’Arthaudière, en Isère, s’en approchent quelque peu. Il serait fondamental d’envisager avec sérieux leur devenir et des principes de conservation mais ces jardins sont privés. Les propriétaires, bien que tous passionnés, ne semblent pouvoir se coordonner pour envisager une quelconque restauration globale. Celle-ci, qui ne peut être envisagée que dans les règles de l’art, paraît, quoi qu’il en soit, hors de portée.
En 1999, deux études admirables et fort complètes, ont été réalisées à l’initiative de la commune d’Autichamp et du CAUE. L’étude historique, fut effectuée sous la direction d’Anne Allimant et l’étude préalable sur les maçonneries le fut par Olivier Naviglio (ACMH). A l’issue de ces dernières, faute de projet tangible, la commune n’a pu prendre que des mesures d’urgence. L’étayage des voûtes fut fait l’année suivante puis en 2008, suite aux dégâts d’orages, une conduite a été réalisée pour dévier les eaux pluviales.
Quant au reste, tout n’est, pour l’instant, qu’une question d’entretien mais gageons qu’un jour le dialogue, la bonne volonté et la prise de conscience permettront une préservation viable, voire une mise en valeur de ce patrimoine sans atteinte à la propriété privée.
La première preuve d’existence des jardins remonte aux années 1592-1595. A cette époque le cadastre mentionne un « jardin du seigneur » sous le barry (village). Situé en dehors de l’enceinte, celui-ci est partagé en petites parcelles ne dépassant guère les 1 ou 2 civayers (1 civayers = 94,97 m2). On peut dénombrer 37 propriétaires. L’ensemble des jardins n’appartient pas au seigneur contrairement aux idées reçues. La surface du jardin d’agrément de ce dernier n’est que de 1 quarte et 2 civayers (759,74 m2).
Comme pour bon nombre de constructions, l’histoire des jardins est intimement liée à l’histoire des Beaumont d’Autichamp. Gaspard issu d’une branche parallèle de l’arbre généalogique, se retrouva avec le fief d’Autichamp en héritage. Né de parents nobles et courtisans du roi, il se devait d’affirmer sa prise en main et d’impressionner ses visiteurs. Arrivant par Roynac, ces derniers tombaient, au détour d’une colline, face à ce paysage parfait. De par leurs dimensions les jardins et le château ne pouvaient provoquer que l’admiration. L’ensemble était à la fois esthétique et surprenant. On ne peut s’empêcher de penser aux maniéristes italiens de la renaissance : « fare piacere, fare stupore ».
Cela ne dura pourtant que quelques courtes générations. Plus près de Versailles que d’Autichamp, la famille Beaumont fut de moins en moins présente. Les jardins perdirent peu à peu leur vocation d’agrément au profit d’une autre plus utilitaire. Le grand projet du Marquis, en 1778, les délaisse complètement à la faveur de terrains vers le nord. Les jardins du seigneur seront sans doute affermés. Après la révolution, lors de l’évaluation des biens de la noblesse, il est fait état de plantations d’artichauts, d’asperges, de vigne et d’arbres fruitiers. Les jardins seront alors partagés en 11 lots formant 22 parcelles.
S'ils ont été construits au pied du village, c’est sans doute aussi à cause de la présence de plusieurs sources, deux petites à l’est et deux grandes qui ont été transformées en lavoirs. Seule l’adjudication des biens révolutionnaires apporte la preuve de bassins de régulation. Il est écrit que deux serves (bassins) étaient situées dans le jardin « une serve presque toute dégradée » et une « serve sans eau ».Il est également noté la construction d’un canal qui servait à arroser les prés de la Cour.
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Au niveau de la terrasse intermédiaire, l’eau passait par des conduits verticaux en pierre de taille au sein des murs. On en dénombre quatre répartis de part et d’autre de l’escalier et un dans la pièce de fraîcheur. Rectangulaires, aux bords arrondis, ces conduits sont percés de deux étranges regards. Il s’agirait d’éventoirs destinés à apporter de l’air au système de canalisation pour un meilleur fonctionnement. La présence de deux portillons alors qu’un seul aurait suffit, peut paraître étrange. M. Naviglio émet une hypothèse tout à fait crédible. A savoir que ces conduits agissaient comme des tuyaux d’orgues en amplifiant et en diffusant le bruit de l’eau, sans que celle-ci soit visible, ajoutant ainsi une subtile touche à l'ambiance de ce jardin d’agrément.
En contrebas, le renfoncement situé en bordure de la route (qui était avant la principale) était, probablement occupé par un bassin ou une fontaine. Sur le cadastre de 1824 celui-ci dépasse même sur la chaussée qui le contourne. On peut facilement imaginer un système de cascades à cet endroit mais pour l’instant il est trop encombré de ronces pour que ce soit vérifiable.
Avec les labours successifs des conduits ont été enlevés, des fouilles pourraient sans doute encore révéler l’ingéniosité de ce système hydraulique gravitaire typique de la renaissance italienne.
Un avant projet du chemin d’intérêt général n° 66, de Saou à Grâne avait été envisagé dès 1885. Le conseil municipal, consulté à propos du tracé refusa de prendre en charge les suppléments qui lui avaient été assignés. Le chemin, s’il passait dans la plaine à 150 m du village, à l’emplacement de l’ancienne route, occasionnerait une moindre dépense. Cependant l’année suivante une pétition des habitants demandait l’approbation d’un tracé passant le plus près possible.
Le 15 mai 1897, une lettre du maire demandait donc que le chemin soit remonté au dessus du village. Cette demande fut refusée au prétexte que cela rallongeait la distance et nuisait aux intérêts de la commune d’Auriples. Parallèlement une pétition de 14 propriétaires de la Répara demandait que le chemin soit carrément sur la rive gauche de la Grenette.
L’ingénieur trouva donc un compromis et les communes durent faire des concessions. La route passera au sud, au pied du village dans les jardins. 14 parcelles seront achetées, en août 1902, en vue de sa construction occultant ainsi de nombreuses traces de connexions entre le village et les jardins.
En 1999, Olivier Naviglio avait calculé, à titre de curiosité, qu’il avait fallu déplacer 22 000 m3 de terre pour réaliser de tels jardins. On ne peut que prendre conscience de la main d’œuvre nécessaire. Cela aurait couté environs 27,5 millions de francs hors taxes soit près de 8 millions d’euros toutes taxes comprises aujourd’hui (en tenant compte de l’augmentation du coût de la construction depuis 1999).
Aujourd’hui, l’ouvrage est mal en point. Toutes les couvertines des murs ont disparu. Les parties sommitales sont toutes en mauvais état. L’eau s’infiltre et lessive les joints. La totalité de l’enduit d’origine est absent. Ces murs n’étaient pas en pierres apparentes. Les plantes grimpantes et même quelques arbres ont pris racine dans ces anfractuosités. Des déformations importantes commencent à apparaître et certains contreforts se désolidarisent.
L’escalier de la pièce de fraîcheur est l’élément le plus en péril. A l’ouest, l’emmarchement est en partie effondré. A l’est, il l’est complètement. A l’intérieur l’enduit est saturé de sel. L’eau suinte au travers des maçonneries et sur le sol. La petite baie d’où elle devrait s’écouler est obturée par les gravats. L’eau a été ensuite, fort heureusement, canalisée par le nouveau propriétaire.
Au sud les arcades ont été étayées en toute urgence avec des moellons en béton. Si l’esthétique est discutable cela a permis de les sauver. La première voûte est totalement effondrée. Les autres le sont en grande partie. Seule la dernière est en état mais complètement déjointée et gorgée d’humidité.
D'aprés M. Naviglio, l’urgence se porte sur deux éléments significatifs des particularités des jardins d’Autichamp : l’escalier et sa pièce de fraîcheur et les voûtes.
Les coûts TTC actualisés d’une restauration d’après l’estimation de M. Naviglio
Terrasse 1 191 135 €
Terrasse 2 476 754 €
Terrasse 2, angle ouest 35 349 €
Escalier et pièce de fraîcheur 327 314 €
Terrasse 3 335 035 €
Voûtes 264 024 €
Revers ouest 130 134 €
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Total 1 759 745 €
Ces jardins sont dans le périmètre du village inscrit à l'inventaire des bâtiments de France. Ils ne sont pas classés.
Situé à quelques centaines de mètres en contrebas du village, ce pont en pierres de taille, d’une longueur de 33m traverse la Grenette. Ce petit affluent de la Drôme s’écoule d’Auriples en direction de Grâne.
Il est cité pour la première fois dans les archives municipales en 1590, ce qui, à deux années près, le rend contemporain des jardins. Son architecture qui rappelle celle de la Lombardie du 12° et 13° siècle et le fait qu’il soit souvent appelé localement « pont romain » ou « pont roman » ne veut pas dire qu’il soit plus ancien. Les récents travaux de restauration n’ont pas révélé l’existence d’un précédent ouvrage, ni de réemploi. Bien que le débit de la rivière varie de 0,4 à 80 m3 lors de fortes pluies, c’est à gué qu’elle devait être traversée.
Au sud, la route partait en direction de Marsanne. Elle a gardé une partie de son pavage irrégulier. Quelques mètres après le pont, elle passe entre deux énormes rochers, dont l’un fut entaillé au ciseau. Le choix de ce parcours reste énigmatique. Il est possible que ce fût un ancien chemin romain. Des débris de tuiles et de céramiques avaient été signalés au quartier du Tridolet par M. Paul Valette. Cet endroit rocheux fut, peut être, aussi choisi pour une meilleure assise du pont.
Côté nord, la route se partage en deux : vers Autichamp à l’ouest et vers une métairie du château et le prieuré à l’est pour aller en direction de Crest. Elle rejoignait ensuite la vallée de la Drôme en passant par la Vaumane.
Ce pont est le seul ouvrage de ce type dans le département. Il n’a pas subi les frasques de la modernité et est resté dans son écrin naturel. On ne peut que déplorer qu’il ne fasse pas partie du périmètre inscrit du village et n’ait aucune protection. Il entre avec bonheur dans la composition du paysage et bon nombre de randonneurs le traverse chaque semaine.
La restauration de ce pont fut envisagée sous le mandat de Philippe Giraud mais elle ne se concrétisa que sous celui de Denis Lattard en 2004.
Lors de son diagnostic Olivier Naviglio, architecte du patrimoine, constatait le mauvais état de l’ouvrage. L’absence d’étanchéité, la destruction et le comblement de la chaussée avaient occasionné de réels dégâts. Les infiltrations avaient conduit à la dissolution des joints entraînant ainsi la désolidarisation de certaines maçonneries. La destruction des effets de harpage et la modification des contraintes auraient pu entraîner à terme, la destruction de l’édifice.
De son côté, le parapet, suite à l’élargissement de la chaussée, servait de soutènement, fonction pour laquelle il n’était pas prévu. Il présentait un aspect ruiniforme et par endroit, du dévers. Ses couvertines avaient en majorité disparu. Seules quelques unes gisaient au fond de la rivière.
A l’amont, l’avant bec était (et est toujours) noyé dans le remblai de la berge. Sa base subit la sape de la Grenette, ce qui provoque un affouillement surtout lors des crues. Durant les fortes pluies l'eau devrait s'écouler sous les trois arches.
Le tout était envahi par la végétation.
Les travaux dont le montant avoisinait les 100 000€ HT, furent subventionnés par le département (29.75%), par l’état (15%) et par l’Europe (FEDER 35.25%). Ils furent réalisés par l’entreprise Chazet de Cléon d’Andran.
Fichage et rejointement furent effectués en vue d’assurer la cohésion de l’ensemble. Au pied des piles, une partie du parement fut déposée et reposée. Après une mise en cintre, des clavaux de l’arche sud furent remplacés. Le parapet fut reconstruit et les couvertines remises en place. Les joints de ces dernières furent effectués au plomb et une patine fut appliquée.
Les travaux firent l’objet d’un dossier présenté au concours des Rubans du Patrimoine. L’Association des Maires de France, Dexia Crédit Local, la Fédération Française du Bâtiment et la Fondation du Patrimoine en était les partenaires. Ce prix départemental fut décerné à la commune d’Autichamp et remis au maire en octobre 2005 à Valence.